Réalisé par : Jacques Audiard
Avec : Marion Cotillard, Matthias Schoenaerts, Corinne Masiero...
Durée : 1h55
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Pouvez-vous
affronter le monde avec vos poings levés, et avancer, sans peur ?
Tout tourne autour de cela. Des
mots, de la main de l'écrivain Craig Davidson, transcendés à
l'écran par le tourbillonnant nouveau fragment de l'oeuvre
d'Audiard, fils. Le cinéaste français s'émancipe du microcosme
asphyxiant et carcéral d'Un prophète
pour composer une symphonie sensorielle en pleine lumière, sous le
soleil du Sud de la France. Ali (Matthias Schoenaerts) débarque sans
le sou chez sa sœur, à Antibes, avec son fils Sam, qu'il connaît à
peine, et une rage sombre qu'on décèle derrière ses yeux clairs.
Stéphanie (Marion Cotillard) dresse des orques et se nourrit des
égards du public, et des hommes, pour se sentir vivante... jusqu'à
ce jour tragique où elle perd ses jambes.
De
ces deux êtres mutilés, Audiard orchestre, la veille de l'accident,
la rencontre, somme toute banale, à coup de baston en discothèque
et de sang sur les lèvres. Il y a une intuition proprement lyrique
chez le réalisateur à sublimer, par l'accrochage d'un regard
détourné, d'un geste anodin, l'aura insensée de ses acteurs. Après
le prince noir Rahim, Audiard s'est trouvé une nouvelle tête brûlée
en la silhouette bourrue du flamand Schoenaerts, géniale révélation
de Bullhead.
Face à lui, Marion Cotillard, muse candide et délicate, transpire
de pudeur et de finesse, dans ce qui est sans conteste le plus beau
rôle de sa carrière.
C'est
que le couple a dans son visage et son jeu cette disposition à
incarner tous les subtilités désirées par le metteur en scène.
Comme un puzzle privé d'une pièce, Stéphanie s'assemble et se
reconstruit par étape, en combattant la dépression et l'envie d'en
finir qui l'assiègent . Un long processus qui s'achève enfin
lorsqu'elle accepte d'être à nouveau une femme qui désire, et
donne du désir. « Moi je suis
quoi pour toi ? Une amie ? Une copine ? Un genre de
pote ? Si tu veux qu'on continue, faut faire les choses bien »
lance
Stéphanie, quand la perte de repères se conjugue avec un être
cher. Ali,
ce mâle brut(e) passé maître dans l'art de transformer son
existence en cycle autodestructeur, se montre inapte à faire la
différence entre délicatesse affective et délicatesse amoureuse.
Tout un pan de la société contemporaine, ce jeu du « j'te
baise, moi non plus », cristallisé dans cette frontière amorphe
entre amitié et amour. Une fusion des corps, une ambiguïté
relationnel comme seul Audiard en a le secret.
Jacques Audiard explore, sans boussole, sa réinterprétation de l'amour et de la renaissance. Sur fond de musique envoûtante, De rouille et d'os irradie d'une telle maîtrise qu'on ne sort pas indemne de ce flamboyant voyage onirique. L'imperfection filmé à la perfection.
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